Pour Debora Campailla, le BDSM est une évidence depuis toujours. Celle qui partageait déjà son quotidien et ses réflexions sur les réseaux sociaux a donc tout aussi naturellement parlé de BDSM lorsqu’elle est entrée dans une relation de soumission / domination il y a trois ans et demi. Aujourd’hui, la jeune femme est reconnue en tant que coach BDSM et alignement de soi. Nous avons voulu en savoir plus sur la jeune créatrice de contenus, de son parcours en tant que soumise à l’éducation au BDSM qu’elle fait sur ses réseaux.
Lou : A quel moment as-tu découvert ton attrait pour le BDSM, et plus particulièrement la soumission ?
Debora : J’ai été attirée par le BDSM très jeune, au même moment où j’ai découvert ma sexualité vers l’âge de 14 ans. Même seule, les désirs étaient en moi, sauf que je ne savais pas mettre les mots dessus car je n’avais aucune éducation à ce sujet. Puis, j’ai mis de côté cet attrait pendant un long moment suite à des agressions. Il m’a donc d’abord fallu guérir et refaire un avec ma sexualité avant de le redécouvrir et de le mettre en priorité dans ma vie au moment où j’ai rencontré Maître il y a trois ans et demi. A ce moment-là, la soumission est devenue évidente. On ne faisait que ça de toute façon, pas de sexe vanille. Et de mon côté, j’ai pu en faire naturellement une priorité.
J’ai appris récemment qu’on pouvait faire son coming-out BDSM au même titre qu’un coming-out gay, lesbien, bi ou autre.
C’est tout à fait possible en effet, en fonction de la place qu’on a envie de donner au BDSM dans sa vie. S’il s’agit juste de pratiquer de temps en temps au lit avec des partenaires, c’est peut-être simplement avec eux qu’il faut en parler, mais s’il s’agit de sa seule sexualité, voire même d’un mode de vie, il devient peut-être nécessaire de faire un coming-out. Ce qui est mon cas : je ne fais pas autre chose que du BDSM, je suis dans une relation 24/7 avec quelqu’un. Mais, pour beaucoup de personnes, le BDSM ne prend de place qu’au lit, ce n’est pas comme une orientation sexuelle ou amoureuse.
Et toi, as-tu fait ton coming-out BDSM ?
Par la force des choses étant donné que je suis en ligne et que mes amis et ma famille sont en ligne, mais à l’origine, ça s’est fait par un autre chemin. J’avais prévenu mes parents que je voulais faire du porno, justement parce que je suis dans le BDSM, ce que je n’ai finalement pas fait. Mais, il reste des personnes qui ne sont pas au courant comme les parents de mon copain, qui est également mon maître… Après, je n’ai aucun problème pour le dire et je pense que ça se voit rapidement, notamment parce que je porte des colliers, etc.
Comment vous êtes-vous rencontrés avec ton maître ?
Ça a été à la fois facile et difficile dans le sens où, pour faire une bonne rencontre, il faut déjà être à l’aise avec soi-même. Je ne pouvais pas rencontrer une bonne personne dans la domination sans décider d’en faire une priorité personnelle, dans ma sexualité, dans ma vie, dans mon polyamour, ou encore dans mes kinks. En revanche, à partir du moment où je l’ai assumé, c’est devenu une priorité et j’ai rencontré Maître en deux heures sur une application. Je l’ai d’abord abordé sous l’angle du petit ami puis du Maître mais ça a été une évidence entre nous. C’est aussi ce que j’observe chez les personnes que j’accompagne en coaching. Tant qu’elles ne sont pas prêtes, elles ont du mal à trouver un bon partenaire et à partir du moment où elles assument leurs rôles, c’est instantané.
Tu parlais de polyamour à l’instant. Es-tu dans des relations BDSM avec d’autres personnes ?
Je l’ai été, surtout au début de notre relation. Maître était quant à lui encore avec son ex-femme. Mais maintenant, notre relation ensemble nous prend beaucoup de temps donc on n’a pas le temps d’avoir d’autres relations. Après, on relationne parfois en groupe ou à plusieurs dans le sexe.
Comment cette relation de soumission / domination a-t-elle affecté ta sexualité et ta vie ? Parce que si j’ai bien compris, tu es dans cette relation 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 et tu ne fais pas du tout de sexe vanille.
Ma relation avec Maître est arrivée au moment où j’ai compris que, pour moi, l’échange de pouvoir était un fétiche et non simplement un kink, c’est-à-dire que, pour moi, c’est nécessaire. Je peux faire du sexe vanille mais c’est comme un massage ! Je suis contente d’être là, mais je ne suis pas excitée. Aujourd’hui, je ne pratique plus du tout de sexe vanille et si je regarde en arrière, j’en ai très peu fait et quand c’était le cas, je me forçais un peu en réalité. Et au sujet de ma relation BDSM, elle est effectivement 24/7 donc autant dans ma sexualité qu’hors sexualité.
Elle te vient d’où cette idée de créer un compte sur le BDSM à visée éducative ?
J’utilisais déjà les réseaux sociaux depuis pas mal d’années pour parler de ma vie et de mes réflexions. Donc quand je suis allée vers le BDSM, je l’ai partagé naturellement et comme j’étais déjà dans une posture de coach à cette époque, je me suis dit pourquoi ne pas allier les deux : le coaching et le BDSM. J’en ai fait une véritable intention sur mes réseaux, d’autant que le besoin est énorme. En plus, le partage, l’éducation et l’alignement de soi ont toujours fait partie de moi. Le BDSM est une porte d’entrée.
Mais il n’est pas si facile de parler de BDSM sur les réseaux sociaux. J’ai remarqué que tu utilisais différents stratagèmes pour ne pas te faire supprimer ton compte. Par exemple, tu ne dis jamais BDSM en entier ou tu te présentes comme “coach alignement de soi” uniquement sans la partie “BDSM”. On ne peut pas tout dire sur les réseaux sociaux. Le comprends-tu et comment le vis-tu ?
Je le comprends dans le sens où c’est important d’avoir des algorithmes qui mettent en sécurité les personnes d’une plateforme mais ils sont de plus en plus restrictifs. Instagram n’accepte même plus le terme “sexothérapeute” par exemple. Et la censure est constante, c’est-à-dire que même avec toutes les autocensures de mots que je fais, à partir du moment où j’évoque une pratique, même d’un point de vue éducatif et sans la montrer, je suis à deux doigts de perdre mon compte. j’ai déjà perdu déjà au moins 5-6 comptes ! Et pas seulement sur Instagram. La censure est trop forte mais surtout, il n’y a pas les outils disponibles pour censurer ce qui est vraiment nécessaire.
Même sans parler de BDSM, on manque d’éducation à la sexualité sur les réseaux sociaux. Alors quand on parle de BDSM, c’est presque plus important d’éduquer les gens sur ces pratiques au regard du fait qu’elles sont plus engageantes, voire dangereuses.
Totalement. Pour moi, l’éducation à la sexualité et au consentement est une nécessité de santé publique. Le BDSM a lui aussi besoin d’éducation pour le pratiquer en connaissance de causes et en toute sécurité.
Comment choisis-tu les sujets que tu traites sur ton compte ?
Dans un premier temps, je les choisis en fonction des questions qui reviennent le plus souvent. Je suis très proche de ma communauté donc j’écoute beaucoup ses besoins. Je les choisis aussi par rapport à mes expériences, bonnes ou mauvaises, et je fais aussi des liens avec les programmes de coaching que je sors.
Comment se passe une séance de coaching ?
Chaque coaching est vraiment adapté à la personne ou au couple que j’ai en face de moi, peu importe leur niveau de BDSM. Il y a même des personnes qui viennent me voir qui ne font pas de BDSM et qui ne sont pas attirées par ça mais qui viennent pour l’alignement de soi. Je fais d’abord l’analyse de toutes leurs problématiques et leurs objectifs avant de créer une stratégie sur-mesure à suivre pour les prochains mois. Dans mon approche, le BDSM est lié à tous les autres domaines de la vie. Il peut impacter ton travail, ton affirmation, ou encore ta confiance, donc je travaille sur l’ensemble des domaines de vie d’une personne pour les coachings les plus poussés. Mais, je propose aussi des accompagnements plus spécifiques autour d’un thème, par exemple la soumission en 30 jours.
Aujourd’hui, ton compte Instagram rassemble plus de 27000 personnes. Est-ce que tu t’attendais à ça ?
Je m’attendais à plus car je ne m’attendais pas à la censure ! Je trouve ça énorme évidemment mais j’ai conscience du besoin donc 27000 personnes par rapport à ce besoin, c’est peu ! D’autant que dans le milieu BDSM francophone, c’est difficile d’avoir accès à ce type d’informations.
Vous pouvez retrouver votre coach par ici :
https://www.instagram.com/simplement.debora.official/
https://simplementdebora.com/