Qui ne se rappelle pas de l’excellent reportage sur cette maison d’hôtes gay française, spécialisée dans le fist-fucking anal, au doux nom de la Fistinière ? Chacun sa spécialité après tout. Nous n’avons malheureusement pas pu aller y mener notre enquête pour cet article car la maison a depuis fermé mais avons quand même cherché à percer tous les mystères du fist. En profondeur bien sûr.
Le fist-fucking : qu’est-ce que c’est ?
Pratique sexuelle extrême mais pas BDSM
Signifiant littéralement en argot anglais « foutre avec le poing« , la pratique du fist-fucking renvoie bien à l’action d’avoir le poing dans le vagin ou le rectum. En revanche, contrairement à ce que son nom indique, il s’agit plus d’une lente introduction de la main, dont les doigts sont gardés tendus, dans l’orifice choisi, plutôt que d’une vraie pénétration avec le poing.
C’est le Marquis de Sade, figure de proue du sadomasochisme, qui évoque en premier la pratique du fist. On la retrouve ainsi dans La Philosophie dans le boudoir en 1795 lorsqu’il fait s’écrier à son personnage Dolmancé : « Foutredieu, mon extase est complète, vous les enfoncez jusqu’au poignet…« . Cela étant dit, la pratique est aujourd’hui extrême mais loin de l’univers BDSM. Celui qui est pénétré peut bien sûr ressentir de la douleur, comme pour la sodomie d’ailleurs, mais contrairement au BDSM, ce n’est pas elle qui déclenche le plaisir. Ici, ce sont vraiment des sensations agréables qui sont recherchées et à l’origine du plaisir.
Dans Fist, publié en 2015, le professeur de philosophie et écrivain Marco Vidal (pseudonyme) révèle même la charge amoureuse de cette main qui vient se mettre à l’intérieur du corps en plus de préciser que cette pratique n’emprunte pas aux codes SM.
Pratique sexuelle marginale mais en augmentation
Les chiffres concernant la pratique du fist-fucking ne sont clairement pas nombreux. Cependant, l’enquête ACSF (« Analyse des comportements sexuels en France« ) sur la sexualité des Français s’y était intéressée. Elle avait alors dénombré que 6% des hommes homosexuels ou bisexuels interrogés avaient pratiqué le fist-fucking sur un partenaire lors de leur dernier rapport. 6% également avaient reçu un fist au cours de leur dernier rapport.
Plus récemment, le Baromètre gay 2009 révélait que 23% des sondés avait pratiqué le fist-fucking au cours des douze derniers mois. Un chiffre en nette augmentation par rapport à la précédente étude.
Il n’existe néanmoins pas d’étude sur la pratique du fist chez les lesbiennes et les hétéros. Avoir de tels chiffres pourrait affiner les résultats et montrer l’ampleur de la pratique. Car les articles récents en matière de sexualité dévoilent que le sexe anal aurait a priori la cote.
Pratique sexuelle gay mais pas que
La pratique du fist-fucking n’est donc pas exclusivement gay. Toutefois, à travers la petite histoire du fist, on voit qu’elle est d’abord populaire dans la communauté gay avant de s’étendre.
Les premières traces de cette pratique remontent aux années 60 aux Etats-Unis. C’est dans un Etat du monde alors très puritain qu’un groupe de personnes se rassemble pour créer la TAIL (« Total Ass Involvment League » ou en français « Ligue pour l’engagement total dans le cul« ). Explicite. Et le petit groupe de 1500 personnes revendique la pratique du fist-fucking.
Toujours aux Etats-Unis, selon l’anthropologue Gayle Rubin, la pratique se popularise davantage dans les années 70. C’est à ce moment-là qu’un club privé gay de San Francisco, appelé The Catacombs, acquiert une certaine réputation pour cette spécialité. Sa clientèle finira par compter autant de pratiquants que de pratiquantes. La pratique du fist intrigue et s’étend à d’autres orientations sexuelles.
Surtout dans le cul mais aussi dans le vagin
Certes, la pratique étant plus répandue dans la communauté gay, le fist concerne plus l’anus. Pourtant, selon la réalisatrice, journaliste et ancienne actrice pornographique Ovidie, fister un vagin est beaucoup plus facile que fister un anus. Déjà parce que le vagin est plus « élastique » que le rectum. Mais Ovidie indique aussi que « le fist est en revanche beaucoup plus répandu chez les couples de filles [que chez les hétéros] (…). Le fist vaginal permet une lente et douce exploration de toutes les zones sensibles du vagin, dont le point G« . A bon entendeur Mesdames.
Qu’éprouvent celles et ceux qui aiment le recevoir ?
Le fist-fucking permet donc la stimulation du point G ainsi que de toutes les zones sensibles du vagin. Quant aux hommes qui le pratiquent, ils y trouvent aussi leur compte en raison du plaisir intense de la stimulation de la prostate, cette petite glande multiorgasmique.
Les témoignages font aussi état de la sensation d’être comblé, tout autant physiquement, par la main à l’intérieur du vagin ou du rectum, mais aussi mentalement avec l’idée d’intimité partagée au plus profond de son être. Et nous voulons bien le croire. Dans un article pour Santé Publique France (« Fist-fucking : comment le pratiquer en toute sécurité« ), le sexologue et spécialiste en santé sexuelle Michel Ohayon disait que « le fist est un plaisir qui s’apprend, vient se chercher et peut être subtil, bien plus que la pénétration classique. La recherche n’est pas la dilatation, mais plutôt d’avoir quelque chose à l’intérieur de soi« .
Les pratiquant.e.s évoquent régulièrement sentir leur corps tout entier traversé par des spasmes de plaisir intense et une jouissance extrêmement longue, après laquelle il faut plusieurs longues minutes pour se remettre. D’autres encore vont même jusqu’à évoquer un état de transe.
Fist-fucking : comment bien le faire ?
Plus que n’importe quelle autre pratique sexuelle, le fist-fucking se prépare ! Que vous soyez le receveur ou le donneur d’ailleurs. Avant de passer à la pratique, intense et intrusive, nous vous recommandons de lire ces quelques conseils d’hygiène, de sécurité et de préparation.
Le matériel
Nous vous conseillons vivement d’utiliser un gant prévu à cet effet. En latex ou en vinyle, vous les trouverez facilement en sexshops et ils ont la particularité d’être lavables et réutilisables. Certains vont parfois jusqu’aux coudes si jamais… Pensez à vous couper et à vous limer les ongles pour ne pas percer le gant, d’autant plus si vous décidez de ne pas en utiliser, vous pourriez blesser l’intérieur de l’orifice de votre partenaire.
Il vous faudra ensuite beaucoup de lubrifiant. Et ne le troquez pas contre de la vaseline. Cette dernière a en effet tendance à attaquer le latex et à rendre poreux les gants. Privilégiez donc du lubrifiant, à base d’eau de préférence, et non à base de glycérine qui va contribuer à faire s’évaporer l’eau du lubrifiant et en conséquence à sécher rapidement, en plus de laisser un dépôt de glycérine dans l’orifice. Pas très agréable, voire irritant. C’est l’eau qui est la clé d’un bon lubrifiant, alors on s’hydrate à fond.
La préparation
Quel qu’il soit, l’orifice prêt à être pénétré par la main doit être abondamment lubrifié. On ne lésine donc pas sur la quantité de lubrifiant.
Un doigt, deux doigts, trois doigts… vous avez compris le principe : allez-y progressivement. Avant l’insertion complète de la main, l’anus ou le vagin doit être progressivement distendu, dilaté, étiré. Choisissez le mot que vous voulez mais retenez que ce type de pénétration demande patience et douceur. Il faut que vous fassiez gagner de la souplesse au sphincter de l’anus ou au vagin avant de pouvoir y entrer la main, toujours doigts tendus et groupés entre eux avant éventuellement de fermer le poing. Vous pouvez d’ailleurs utiliser des jouets pour vous aider à dilater votre orifice.
Fist-fucking : quand ne pas le faire ?
En cas de lésions anales ou vaginales
Déjà, si vous avez des lésions ou que vous êtes irrité.e.s, le fist-fucking ne sera pas du tout agréable. Mais aussi, dans le cas d’une pénétration dans le rectum, le contact entre les matières fécales et les muqueuses irritées pourrait bien entraîner une inflammation, voire une infection.
Avec un partenaire en qui vous n’avez pas confiance
Cela semble aller de soi mais si on vous le propose et que vous ne le sentez pas, ne le faites pas, même si vous êtes intrigué.e.s par la pratique. Car le fist-fucking nécessite un laisser aller total et donc une grande confiance en son ou sa partenaire. Vous allez quand même prendre sa main dans l’anus ou dans le vagin !
Sous l’emprise de drogues ou de vasodilatateurs
Souvent utilisé comme euphorisant, le poppers est aussi parfois utilisé comme vasodilatateur en préparation de la pratique du fist. Mais, est-ce une vraie bonne idée ? En réalité, ce n’est pas tant le poppers qui pose problème mais les substances souvent ingérées ou utilisées en même temps : alcool, drogues, notamment sédatives, produits anesthésiants locaux. Ce sont eux qui sont dangereux car susceptibles d’altérer la sensation, et donc la douleur et la réactivité à la douleur par le cerveau, par un effet de désinhibition.
Fist et « chemsex » (sexe sous drogue) ne font donc pas bon ménage. Le docteur Michel Ohayon déplore : « La plupart des accidents constatés viennent de là [la consommation de drogues]« .